L’affaire du journaliste Monodji Olivier continue de susciter de vives réactions au sein de la corporation des médias et de la société civile. Directeur de publication de l’hebdomadaire Le Pays et correspondant de Radio France Internationale (RFI) à N’Djamena, Monodji Olivier est détenu depuis trois mois pour des accusations initiales d’une extrême gravité. Mais un tournant judiciaire vient de reconfigurer le dossier.
Le juge d’instruction en charge du dossier, a écarté les chefs d’accusation de « complot » et « attentat » contre l’autorité de l’État, retenant à la place des faits qualifiés d’« entretien avec les agents d’une puissance étrangère » et d’« intelligences de nature à nuire à la situation militaire, diplomatique ou aux intérêts économiques du Tchad ». Ce réajustement juridique, confirmé dans une ordonnance de renvoi devant la chambre correctionnelle, allège certes les charges mais n’a pas entraîné la libération du journaliste.
La décision du juge surprend. Selon Maître Alain Ndiliam, avocat au barreau de N’Djamena, cette requalification repose sur des éléments peu étayés : « L’ordonnance ne précise ni l’identité de la puissance étrangère en question, ni celle de ses prétendus agents. Pire encore, aucune preuve n’est fournie pour démontrer qu’il s’agit bien d’agents d’un État étranger », regrette l’avocat, qui dénonce un flou juridique susceptible d’alimenter les soupçons d’instrumentalisation.
Pour rappel, le procureur général, avait initialement requis de lourdes charges contre le journaliste, évoquant un possible « attentat » et un « complot » contre la sûreté de l’État, des crimes passibles de 20 à 30 ans de réclusion. La requalification décidée par le juge ramène l’affaire dans le champ correctionnel, avec des peines encourues allant de 1 à 5 ans de prison.
Dans les milieux journalistiques, la mobilisation en faveur de Monodji Olivier s’intensifie. Plusieurs confrères dénoncent un climat de harcèlement judiciaire contre les voix critiques, dans un contexte politique déjà tendu. Des ONG locales et internationales appellent à sa libération immédiate et à un procès équitable, respectueux de ses droits fondamentaux.
Pour l’heure, Monodji Olivier reste détenu, sans que les charges retenues ne soient clairement étayées, selon la défense. Le calendrier de son audience devant la chambre correctionnelle n’a pas encore été communiqué.
Un cas emblématique qui interroge la liberté de la presse au Tchad, à un moment où les autorités affirment pourtant vouloir promouvoir un climat apaisé et respectueux des droits humains.