Tchad : Les traditions freinent-elles le progrès ?

Dans les rues de N’Djamena, la question divise : faut-il préserver les traditions à tout prix ou les adapter pour accompagner le développement ? Entre attachement identitaire et désir de modernité, les avis sont partagés, parfois tranchés.

Pour certains, les traditions sont la colonne vertébrale de la société tchadienne. « Sans nos coutumes, on ne sait plus qui on est. C’est grâce à elles qu’on reste soudés dans nos familles et nos villages », confie Mahamat, 45 ans, enseignant. Selon lui, les traditions ne sont pas un frein, mais un repère qui structure la vie communautaire. « Le problème, c’est qu’on confond la tradition et l’ignorance. Ce n’est pas la culture qui bloque le progrès, c’est la mauvaise interprétation qu’on en fait », ajoute-t-il.

D’autres estiment au contraire que certaines pratiques traditionnelles empêchent l’évolution des mentalités. « Quand une fille ne peut pas aller à l’école parce qu’on dit que ce n’est pas dans la coutume, c’est bien la tradition qui freine le progrès », dénonce Hadjara, étudiante. Elle plaide pour une réforme culturelle qui fasse la part entre les valeurs positives et celles qui nuisent à l’émancipation. « On peut garder le respect, la solidarité, mais il faut abandonner ce qui bloque notre avenir », affirme-t-elle.

Entre ces deux positions, d’autres jeunes appellent à une approche équilibrée. « Il faut évoluer avec le monde, mais sans se renier. Nos traditions peuvent accompagner le progrès si on les adapte », explique Rodrigue, technicien en communication. Il cite l’exemple des mariages ou des rites de passage revisités aujourd’hui, qui gardent leur essence sans les excès d’autrefois.

Dans les quartiers populaires comme dans les milieux plus instruits, le débat reste vif. La tradition, au Tchad, n’est pas un simple héritage : elle est un marqueur identitaire fort, mais aussi un terrain de tension entre générations.

Au fond, la question n’est peut-être pas de savoir si les traditions freinent le progrès, mais comment les rendre compatibles avec un monde en mutation. Comme le résume Amina, commerçante au marché de Dembé : « Nos parents ont gardé la culture pour nous. À nous maintenant de la faire évoluer sans la perdre. »


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