La récente révision de la Constitution tchadienne, supprimant la limitation du nombre de mandats présidentiels, marque selon Human Rights Watch un net recul pour la démocratie et l’État de droit dans le pays. Cette modification ouvre la voie à un maintien indéfini au pouvoir du président Mahamat Idriss Déby, consolidant ainsi la domination du Mouvement patriotique du salut (MPS) et affaiblissant les perspectives d’un véritable changement démocratique.
« En supprimant la limitation du nombre de mandats, les autorités ont démantelé un garde-fou essentiel contre l’autoritarisme », a déclaré Lewis Mudge, directeur pour l’Afrique centrale de Human Rights Watch. Les amendements, approuvés par une forte majorité à l’Assemblée nationale et boycottés par certains députés de l’opposition, prolongent chaque mandat de cinq à sept ans et légalisent ainsi un règne potentiellement indéfini pour le président Déby, au pouvoir depuis 2021 après la mort de son père.
Human Rights Watch souligne que cette mesure s’inscrit dans une tendance régionale de « coups d’État constitutionnels », contredisant la Charte africaine de la démocratie, qui proscrit les amendements portant atteinte à l’alternance démocratique. Dans un contexte où l’opposition et la société civile sont déjà ciblées par des arrestations et des violences policières, cette réforme accroît le contrôle du pouvoir par le MPS et réduit la possibilité de transferts pacifiques du pouvoir.
L’organisation appelle les autorités tchadiennes à rétablir la limitation des mandats, à garantir un processus transparent et inclusif pour toute réforme constitutionnelle, et à libérer les dirigeants politiques détenus pour des motifs jugés politiques, dont Succès Masra. « La répression est devenue monnaie courante et aujourd’hui, la Constitution elle-même est instrumentalisée pour restreindre davantage les droits des citoyens », conclut Human Rights Watch.