Les premières pluies de la saison se sont abattues sur N’Djamena hier et aujourd’hui, marquant le retour tant attendu de la saison des pluies. Si elles apportent un souffle d’espoir pour les agriculteurs et une fraîcheur bienvenue pour les habitants, ces averses ont aussi ravivé de vives inquiétudes chez de nombreux N’Djaménois, confrontés aux mêmes problématiques récurrentes : inondations, routes impraticables, caniveaux bouchés et absence visible d’un plan d’action des autorités communales.
Les mêmes scènes, les mêmes souffrances
Dès les premières heures suivant les précipitations, plusieurs quartiers de la capitale tchadienne notamment Ridina, Gassi, Amtoukouin, Walia ou encore Moursal se sont retrouvés les pieds dans l’eau. « À chaque pluie, c’est le même calvaire. Nos maisons sont envahies, nos enfants tombent malades, et les autorités ferment les yeux », s’insurge Mahamat Youssouf, habitant du quartier Chagoua.
Des images largement relayées sur les réseaux sociaux montrent des avenues transformées en véritables rivières, des motos et véhicules coincés dans les flaques, et des commerçants contraints d’évacuer leurs marchandises en catastrophe.
Une absence d’anticipation décriée
Les critiques se dirigent directement vers les mairies d’arrondissement et la mairie centrale de N’Djamena, accusées d’inaction et de manque de prévoyance. Malgré les promesses faites lors de la saison sèche concernant le curage des caniveaux et l’aménagement de voies d’évacuation, peu de travaux visibles ont été entrepris.
« On se demande vraiment à quoi servent les taxes que nous payons. Chaque année, la ville semble surprise par la pluie, alors qu’elle revient toujours à la même période », s’indigne une commerçante à walia.
Un défi structurel et politique
Au-delà de l’absence d’initiatives concrètes à court terme, plusieurs urbanistes interrogés par Trace Infos évoquent un problème plus profond : une urbanisation galopante et non maîtrisée, combinée à une planification urbaine quasi inexistante.
« La ville de N’Djamena grandit, mais sans infrastructures adaptées. Les zones basses ne devraient pas être habitées sans travaux de drainage. Or, faute de politiques cohérentes, des populations s’y installent et subissent les pires conséquences chaque saison », analyse un architecte urbaniste qui a requis l’anonymat.
Une urgence humanitaire en préparation ?
Avec des prévisions météorologiques annonçant une saison pluvieuse plus intense que la moyenne, les acteurs humanitaires redoutent déjà des situations critiques si aucune action urgente n’est engagée. L’an passé, plusieurs milliers de personnes avaient été déplacées à N’Djamena à cause des inondations.
Face à ce contexte, la société civile appelle à une mobilisation collective et à une révision du rôle des autorités communales. Plusieurs ONG locales réclament la mise en place d’un plan de gestion des risques d’inondation, incluant à la fois des mesures préventives et des mécanismes de réponse rapide.
Une attente citoyenne grandissante
Dans les rues comme sur les plateformes numériques, les appels à la responsabilité politique se multiplient. Les citoyens n’attendent plus seulement des discours, mais des actes. Car pour eux, les premières pluies ne sont plus une bénédiction seulement : elles sont désormais un révélateur implacable de l’échec des politiques de gouvernance urbaine.
Trace Infos continuera à suivre de près l’évolution de la situation dans les quartiers affectés et donne la parole à ceux qui, au quotidien, vivent les conséquences de ce que beaucoup qualifient déjà de « crise de l’inaction ».