RDC : Le ministre de la Justice, Constant Mutamba, éclaboussé par un scandale de marché public

Coup de tonnerre dans les hautes sphères de l’appareil judiciaire congolais : le ministre de la Justice, Constant Mutamba, a été officiellement livré à la justice pour une série de fautes graves liées à un marché public douteux. À la clé : des irrégularités flagrantes, une société fantôme et un détournement présumé de fonds destinés aux victimes de guerre.

Une procédure entachée d’irrégularités

Au cœur du scandale : un contrat de construction attribué dans des conditions opaques à la société ZION CONSTRUCTION SARL, une entité nouvellement créée en mars 2024. Dès les premières étapes, les règles de passation des marchés publics ont été bafouées. Le recours au gré à gré procédure exceptionnelle n’a pas été suffisamment justifié, et la Direction Générale de Contrôle des Marchés Publics (DGCMP) n’a jamais donné son avis de non-objection avant l’approbation par la Première Ministre. Une violation formelle des règles en vigueur.

Une signature avant… la signature ?

L’affaire se corse avec un élément troublant : la date d’approbation du contrat. Le ministre Mutamba aurait sollicité cette approbation le 1er avril 2025, alors que le contrat n’a été signé que le 14 avril. Une incohérence juridique lourde de conséquences, qui interroge sur la volonté de masquer certaines étapes du processus.

Des chiffres qui ne collent pas

Autre élément perturbant : le montant du contrat. Initialement autorisé à hauteur de 39,8 millions de dollars, le contrat effectivement transmis ne mentionne que 29 millions, sans qu’aucune explication n’ait été donnée pour justifier cet écart de 10 millions USD. Le flou financier s’épaissit.

Une avance au mépris des règles

Le contrat a permis un premier paiement de 19,9 millions USD, soit 66 % du montant total, alors que la loi limite l’avance forfaitaire à 30 %. En l’absence de tout avenant ou justification, ce versement est qualifié d’irrégulier. Plus inquiétant encore : aucun document de garantie bancaire n’a été exigé, contrevenant à l’article 153 du décret sur les marchés publics.

Une entreprise sans fondement

La société bénéficiaire du contrat, ZION CONSTRUCTION SARL, accumule les soupçons : pas d’agrément officiel du ministère des Travaux Publics, effectifs réduits (1 à 2 personnes), aucune expérience prouvée dans le BTP. De quoi éveiller les soupçons sur sa capacité réelle à exécuter les travaux.

Fonds détournés ?

Le financement du projet provient du compte FRIVAO, un fonds censé indemniser les victimes de la guerre de 6 jours à Kisangani. Voir ces ressources détournées au profit d’une entreprise douteuse, sans contrepartie visible, alimente l’indignation publique et pose un sérieux problème éthique et juridique.

Compétence usurpée et projet fantôme

Plus fondamentalement, le projet en question relève des attributions du ministère des Travaux Publics, qui n’a jamais été associé au processus. Pire encore : aucun terrain n’a été identifié pour accueillir la supposée construction. Tout indique qu’il s’agirait d’un projet fictif monté de toutes pièces.

Un ministre rattrapé par la réalité

L’affaire fait grand bruit à Kinshasa, où la justice est désormais appelée à faire la lumière sur ce qui s’apparente à une opération de prédation des ressources publiques. Constant Mutamba, figure controversée mais influente du paysage politique congolais, devra répondre devant les juridictions compétentes d’une série d’actes qui pourraient bien lui coûter son avenir politique.

Dans un pays en quête de transparence et de bonne gouvernance, cette affaire pourrait marquer un tournant dans la lutte contre l’impunité. La balle est désormais dans le camp de la justice.

Constant Danimbe
Constant Danimbe
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