Dans un verdict qui marquera sans doute les annales de la justice congolaise, l’ancien président Joseph Kabila a été reconnu coupable ce mardi par la Haute Cour militaire de Kinshasa de multiples crimes, notamment des crimes de guerre, des actes de trahison et d’insurrection. Il a été condamné à la peine de mort, et doit verser 29 milliards de dollars de dommages et intérêts à la partie civile somme réclamée par l’Etat et les victimes.
Un procès par contumace aux enjeux politiques évidents
Le procès s’est déroulé en l’absence de l’accusé, qui était, selon les autorités, hors du territoire ou sans représentation légale présente. La Cour a également ordonné l’arrestation immédiate de Kabila, aujourd’hui sénateur à vie, afin d’exécuter la sentence. Les griefs retenus contre l’ancien chef de l’État sont lourds : complicité avec la rébellion M23 soutenue selon l’accusation par le Rwanda, coordination d’actions insurrectionnelles, participation à des crimes de guerre (meurtres, torture, rapts) et violations graves du droit international humanitaire.
Selon la Cour, Kabila aurait directement supervisé des activités militaires rebelles, inspecté des camps, participé à des réunions opérationnelles, et assuré le lien entre la rébellion et certaines sphères du pouvoir. L’affaire s’inscrit dans un contexte déjà marqué par une rupture croissante entre Kabila et son successeur Félix Tshisekedi, jalonnée d’accusations mutuelles de trahison et de soutien à l’insurrection armée.
Un verdict aux conséquences incertaines
La peine de mort prononcée est d’autant plus symbolique que la RDC avait maintenu un moratoire sur les exécutions depuis 2003, bien que celui-ci ait été levé en 2024 pour certains cas militaires ou de trahison, en particulier face à la menace rebelle. Dès lors, la mise en œuvre effective de la peine pose de lourdes questions constitutionnelles, politiques et diplomatiques.
Par ailleurs, la condamnation à verser 29 milliards de dollars de réparations à la partie civile (et des montants additionnels pour les provinces touchées comme le Nord-Kivu et le Sud-Kivu) accentue l’ampleur de la sanction financière imposée à l’ancien président. Certains médias parlent d’un total de 33 milliards USD de dommages et intérêts, dont 29 milliards pour l’État congolais et 2 milliards pour chacune des deux provinces affectées. Mais plusieurs défis resteront à relever : Où se trouve Joseph Kabila ? Sans localisation confirmée, son arrestation effective paraît peu probable dans l’immédiat. Le caractère politique du procès sera sans doute fortement contesté par ses soutiens, qui dénoncent une justice instrumentalisée contre une figure de l’opposition. La réaction internationale pourrait être vive, notamment chez les États africains, les organisations de défense des droits humains et les institutions judiciaires internationales.
Le risque de fragmentation politique interne s’accroît dans un pays déjà déchiré par des conflits récurrents dans l’est, des alliances mouvantes entre groupes armés et des tensions institutionnelles.
Une page sombre et symbolique de l’histoire congolaise
Au-delà du sort personnel de Joseph Kabila, cette condamnation représente un tournant : pour la première fois dans l’histoire de la RDC, un ancien président est condamné pour crimes de guerre et trahison, sur la base d’un procès national. Le message est double : il s’agit d’affirmer la souveraineté de la justice congolaise, mais aussi de dissuader tout retour aux logiques de pouvoir personnel mêlées à la guerre.
Reste à voir comment la communauté congolaise tant dans l’appareil d’État que dans l’opinion va interpréter cette sentence historique. Certains y verront une avancée vers la responsabilité et la reddition de comptes ; d’autres un acte de vengeance politique, susceptible de raviver les partages de mémoire et les fractures identitaires. Le temps dira si ce verdict sera suivi d’effet, ou s’il restera un symbole contesté sur l’échiquier politique congolais.