La descente surprise du Président Mahamat Idriss Déby Itno dans les zones inondées de N’Djaména, au lendemain des premières pluies, relève d’un geste fort en apparence : celui d’un chef de l’État proche du peuple, soucieux de constater par lui-même les réalités du terrain. Toutefois, au-delà de la portée symbolique de cette visite sans cortège ni protocole, se pose une question fondamentale : que changera-t-elle concrètement pour les populations régulièrement confrontées aux mêmes fléaux chaque saison pluvieuse ?
Depuis plusieurs années, les inondations à N’Djaména ne sont plus un phénomène imprévu, mais une récurrence tragique, révélatrice des défaillances criantes en matière d’urbanisme, de drainage et d’anticipation. Le canal de Chari-Mongo, les rues de Klémat ou encore les bassins de rétention comme celui de Habéna sont systématiquement cités à chaque saison, sans qu’un véritable plan d’aménagement urbain durable ne voie le jour. Le pouvoir exécute dans l’urgence, communique dans l’émotion, mais tarde à construire des réponses pérennes.
Dans ce contexte, la tournée du président, aussi sincère soit-elle dans l’intention, semble davantage répondre à un impératif d’image qu’à une réelle stratégie de gouvernance. L’absence de mesures immédiates annoncées à l’issue de cette visite renforce cette impression d’un « coup médiatique » sans suite tangible. Les Tchadiens attendent plus que des constats : ils réclament des politiques publiques cohérentes, transparentes, et surtout, planifiées à long terme pour prévenir plutôt que subir.
En somme, si l’acte du chef de l’État témoigne d’une volonté d’écoute, il gagnerait à s’accompagner d’un véritable sursaut institutionnel pour transformer ces visites de terrain en actions concrètes. Autrement, cette proximité affichée risque de se heurter à la lassitude d’un peuple qui n’a que trop souffert de l’inaction chronique.