Le Gabon se prépare à vivre un moment décisif de son histoire politique, avec l’élection présidentielle programmée pour le 12 avril 2025. Un scrutin attendu avec une grande impatience, mais aussi avec une certaine appréhension, car il représente un tournant majeur pour la stabilité politique et le développement économique du pays. Alors que les candidats se multiplient et que les enjeux sont de plus en plus pressants, plusieurs défis se dessinent clairement pour le Gabon, qui se trouve à un carrefour de son destin démocratique.
L’héritage politique et les tensions internes
Depuis l’accession au pouvoir d’Omar Bongo en 1967, suivi par son fils, Ali Bongo Ondimba, la famille Bongo a dominé la politique gabonaise pendant plus d’un demi-siècle. L’élection présidentielle du 12 avril 2025 sera marquée par l’absence d’Ali Bongo, qui après un coup d’État en août 2023, a été destitué du pouvoir. Ce vide politique crée une dynamique nouvelle dans la course à la présidence, ouvrant la voie à de nouveaux visages, mais aussi à des tensions internes au sein de la classe politique gabonaise.
Les partis historiques du pays, notamment le Parti Démocratique Gabonais (PDG), héritier de la dynastie Bongo, se retrouvent face à des défis considérables pour maintenir leur influence. De nouveaux partis politiques, souvent portés par des figures issues de l’opposition, se battent pour séduire un électorat en quête de changement, d’alternance et de réformes.
Cependant, l’héritage de l’autocratie et les tensions internes ne sont pas les seuls défis. La situation politique reste fragilisée par des divisions ethniques et régionales qui, par le passé, ont souvent exacerbé les conflits et mis en péril la cohésion nationale. Le défi majeur consiste à garantir que le processus électoral soit transparent et inclusif, afin d’éviter les tensions qui ont marqué les précédentes élections, notamment celles de 2016.
L’instabilité socio-économique : Un contexte difficile pour l’électorat
Le Gabon, malgré ses ressources naturelles abondantes, notamment le pétrole et le bois, traverse une crise économique profonde. La chute des prix du pétrole ces dernières années a gravement impacté l’économie du pays, déjà fragilisée par une gestion controversée des ressources publiques. Le chômage, notamment parmi les jeunes, reste élevé, tout comme la pauvreté. L’accès aux services publics, tels que la santé et l’éducation, est limité, et les inégalités sociales persistent.
Dans ce contexte de précarité, les Gabonais attendent des réponses concrètes à leurs préoccupations. Les candidats à l’élection présidentielle devront proposer des solutions efficaces pour relancer l’économie, créer des emplois et améliorer les conditions de vie de la population. Cependant, la gestion des ressources naturelles et la diversification économique demeurent des sujets complexes qui nécessitent des politiques audacieuses et durables.
Le défi de la crédibilité du processus électoral
Les élections présidentielles au Gabon ont souvent été marquées par des accusations de fraude, de manipulation des résultats et de violence post-électorale. La communauté internationale, ainsi que les organisations de la société civile gabonaise, ont exprimé des préoccupations quant à l’intégrité du processus électoral. La confiance des citoyens dans les institutions électorales est fragile, et de nombreuses voix s’élèvent pour demander des réformes profondes afin de garantir des élections transparentes et crédibles.
Le défi ici réside dans l’amélioration du système électoral. Il est crucial de renforcer la transparence des élections, de garantir l’indépendance de la Commission Électorale Nationale Autonome et Permanente (CENAP), et de veiller à une observation électorale internationale rigoureuse. Les défis logistiques, notamment la distribution des cartes d’électeurs et la gestion des bureaux de vote dans les zones rurales, doivent également être résolus afin de permettre une participation électorale plus large et plus équitable.
L’enjeu de la participation des jeunes et des femmes
Le Gabon, comme de nombreux pays africains, dispose d’une population jeune, dynamique et engagée, mais sa participation politique reste relativement faible. De nombreux jeunes, frustrés par un système politique perçu comme élitiste et déconnecté de leurs préoccupations quotidiennes, hésitent à se rendre aux urnes. La mobilisation de cette tranche de la population constitue un défi majeur pour les partis politiques, qui devront leur proposer des programmes attractifs, porteurs de changement et de modernité.
De même, les femmes, qui représentent une part significative de la population, demeurent sous-représentées dans les instances de décision. Les organisations féministes et les activistes de la société civile militent pour une meilleure inclusion des femmes dans les processus électoraux et politiques. Les candidates féminines, bien que présentes dans la course, restent marginales, ce qui soulève la question de l’égalité des sexes dans la politique gabonaise.
Les tensions géopolitiques et les relations internationales
Au niveau géopolitique, le Gabon évolue dans un contexte complexe, marqué par les rivalités régionales et les enjeux géostratégiques en Afrique centrale. Le pays entretient des relations cruciales avec ses voisins, en particulier le Cameroun et la Guinée équatoriale, ainsi qu’avec les puissances internationales comme la France et les États-Unis. L’issue de l’élection présidentielle pourrait avoir des répercussions sur la politique étrangère du pays, notamment en ce qui concerne les relations économiques et sécuritaires.
En outre, l’opinion publique attend des candidats qu’ils apportent une vision claire sur la politique extérieure du Gabon, notamment en matière de coopération avec les organisations régionales telles que la CEMAC (Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale) et l’Union Africaine.
Un tournant décisif pour le Gabon
L’élection présidentielle du 12 avril 2025 représente un moment crucial pour le Gabon. Elle offre l’opportunité d’engager des réformes profondes et d’apporter des réponses aux défis économiques, sociaux et politiques qui pèsent sur le pays. Cependant, elle comporte également des risques, notamment en raison de la polarisation politique, des défis logistiques et des incertitudes concernant la transparence du processus électoral.
Si le Gabon parvient à surmonter ces obstacles et à organiser des élections libres et transparentes, il pourra ouvrir une nouvelle ère pour son développement et sa stabilité politique. Toutefois, cela dépendra de l’engagement des acteurs politiques à œuvrer pour le bien-être de tous les Gabonais, indépendamment de leur appartenance politique ou ethnique. L’avenir du Gabon se joue dans les urnes, et chaque voix comptera dans cette élection historique.