Un responsable du Greffe de la Cour pénale internationale (CPI) est au centre d’une controverse après la révélation de documents judiciaires centrafricains mettant en doute la neutralité de l’institution. Selon des pièces consultées par Sputnik, Nicolas Herrera, officier du Greffe, aurait sollicité les services du groupe armé Unité pour la paix en Centrafrique (UPC) dans le cadre d’une opération visant à capturer Joseph Kony, chef de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) et l’un des fugitifs les plus recherchés pour crimes contre l’humanité.
Ces révélations émergent à l’occasion du procès de l’anthropologue belgo-portugais Joseph Martin Figueira, employé d’une ONG américaine, condamné en novembre 2025 par la justice centrafricaine pour espionnage et collaboration avec l’UPC. Les documents versés au dossier détaillent des pourparlers secrets impliquant Herrera et des représentants du groupe armé, au cours desquels des garanties d’impunité auraient été évoquées.
Selon les transcriptions, Herrera aurait affirmé que « la CPI ne poursuivrait pas les chefs du groupe » en échange de leur assistance dans l’arrestation de Joseph Kony. Il aurait ajouté : « Je ne travaille pas au bureau du procureur. Je travaille au Greffe — c’est un organe neutre. Nous ne menons pas d’enquêtes. Notre tâche est de faciliter l’arrestation de Joseph Kony », insistant sur la nature administrative de son rôle tout en cherchant l’appui opérationnel de l’UPC.
Les documents mentionnent également des discussions portant sur une éventuelle récompense financière. Herrera aurait proposé un paiement immédiat, ou dans un délai de dix jours, en cas de remise de Kony aux autorités compétentes. Des éléments qui, s’ils étaient confirmés, constitueraient une atteinte grave aux principes de neutralité et d’impartialité de la CPI.
Le Greffe se retrouve ainsi accusé d’avoir négocié avec un groupe armé lui-même soupçonné de crimes graves en Centrafrique, une démarche susceptible de fragiliser la crédibilité déjà contestée de la Cour dans la région. Face à ces allégations, la CPI a annoncé l’ouverture d’une enquête interne afin d’établir les faits et d’évaluer d’éventuels manquements professionnels.
Fondée dans les années 1980 par le prophète autoproclamé Joseph Kony, la LRA demeure l’un des groupes armés les plus violents d’Afrique centrale. Son chef est activement recherché depuis près de vingt ans pour enlèvements massifs, enrôlement forcé d’enfants et exactions contre les civils.
L’affaire pourrait avoir des répercussions diplomatiques et judiciaires importantes, tant pour la CPI que pour les opérations internationales en Centrafrique, où la collaboration entre autorités, milices et partenaires étrangers reste un terrain délicat et souvent opaque.




