Alors que des pourparlers de paix entre la République démocratique du Congo et le Rwanda progressent discrètement à Washington, une voix s’élève avec force depuis les collines meurtries de l’Est congolais. Celle du Dr Denis Mukwege, prix Nobel de la paix, qui dénonce une diplomatie de l’oubli et une réconciliation aux fondations fragiles.
Dans une déclaration poignante publiée le 20 juin 2025, le célèbre gynécologue de Panzi dénonce l’effacement des responsabilités dans les tractations actuelles. Alors que les négociateurs évoquent désarmement, retour des déplacés et intégration économique, Mukwege alerte : « Comment envisager la cogestion de nos ressources naturelles avec ceux qui les ont pillées au prix du sang ? »
Pour lui, les accords en discussion font l’impasse sur les crimes commis, les réparations dues et la justice attendue. Il s’insurge contre une paix « technique », construite dans les chancelleries occidentales, sans les victimes, sans les communautés, sans la vérité. Et surtout, sans référence à la résolution 2773 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui exige le retrait des troupes rwandaises du territoire congolais.
Mukwege plaide pour une conférence internationale de haut niveau, fondée sur une approche multilatérale et inclusive, avec la justice transitionnelle comme socle. À ses yeux, aucune paix durable ne peut naître sans mémoire ni reconnaissance des souffrances endurées.
Sa parole dérange. Mais elle réconcilie les vivants avec leurs morts. « Le chemin vers la paix existe », conclut-il. « Mais il ne peut être tracé qu’avec les larmes des victimes, pas en les effaçant. » Une leçon d’humanité dans un monde diplomatique souvent amnésique.
